Julien alias « Blank city » sur Instagram est un artiste français vivant à Marseille. Il photographie et sublime villes, rues et architectures via des compositions minimalistes, lumineuses et colorées.

« Mon intérêt pour la photographie tient beaucoup à mon goût pour le déplacement. (…) Photographier la ville et l’architecture, en mon sens, est la forme d’art la plus accessible et en même temps, une des plus difficiles. Il s’agit de changer mon regard sur la routine. Et essayer par là de changer le regard des autres sur leur ville, sur leurs rues. (…) J’aime la répétition du même. Marcher mille fois dans une même rue et photographier mille fois le même mur, mais de façon différente. Sous un angle différent, à différentes heures, avec une lumière différente. Ça ne marche pas tout le temps, ça prend du temps, il faut souvent patienter jusqu’à l’été, ou l’hiver, pour que la lumière revienne de telle manière sur tel coin de mur avec telle intensité. J’aime appréhender la photographie sous cet angle du temps qui passe, et du photographe qui passe, à travers ce temps d’attente, comme un outil qui vient révéler un décor onirique derrière une façade monotone. » nous explique-t-il.

« Je viens par exemple de déménager et j’ai de nouvelles rues dans lesquelles je passe tous les jours pour aller travailler. Je me sens comme investi d’une tâche, de documenter ce nouveau quotidien de formes, d’ombres, de couleurs et de lumière. C’est comme passer le réel dans un tamis et n’en garder que ces éléments visuels narratifs et minimalistes. Bien sûr, il y a une recherche, j’ai repéré un immeuble aux formes parfaites, mais n’ai pas encore trouvé le moment où la lumière vient parfaitement mettre en valeur une forme ou souligner un trait pour former un bloc photographique parfait. J’y vais donc tous les jours, à différentes heures, tout en sachant que peut-être, il n’y aura pas de juste moment pour ce lieu, que cela restera peut-être sans intérêt. » rajoute-t-il.

La photographie, Julien a commencé à la pratiquer il y a une quinzaine d’années. « Je suis musicien et j’ai commencé à prendre un appareil photo argentique avec moi pour les tournées. De façon très « touristique », pour les souvenirs. Puis j’ai continué, en argentique, à documenter mon quotidien, comme un journal intime, pendant une dizaine d’années. Avec des images assez granuleuses, sombres, de sensations, de moments, de paysages. » nous dit-il.

Ce n’est qu’en 2017 que Julien a démarré son projet de photographies d’architecture, appelé « Blank city », que vous pouvez découvrir sur son compte Instagram. À cause ou grâce à… une blessure au dos ! « Je devais partir en montagne pour l’été, mais je me suis blessé au dos en abusant sur le sport juste avant de partir. J’étais bloqué, le dos droit sur une chaise pour un mois d’été. Du coup, je passais énormément de temps sur les réseaux, à regarder des images sur Instagram, à chercher des idées, et comment occuper ce temps de presque totale inertie.

J’avais un bon appareil photo numérique que je n’avais presque jamais utilisé et j’ai commencé à sortir autour de chez moi avec l’appareil, je ne pouvais pas aller très loin à cause de mon problème, j’ai cherché quoi regarder dans ces rues que je connaissais par cœur. Quoi trouver de neuf là-dedans. Et j’ai développé une fascination pour la lumière, car c’était elle le vecteur de création, qui venait changer la forme de la ville selon l’heure, qui venait mettre du nouveau sur le quotidien et les murs que je pensais gris et sans intérêt.

Il est difficile pour moi d’analyser ce que je fais, car je suis à 99% dans la prise de vue, l’accumulation de matière photographique. C’est comme une chasse au trésor, avec à la clé, la forme parfaite, avec la lumière parfaite et les couleurs parfaites. Je suis plus focalisé sur cette quête que sur le résultat, car il est forcément toujours imparfait. Faire une photo parfaite serait certainement signe que je n’en prendrai jamais plus d’autres, c’est donc une des choses que je redoute le plus. » précise-t-il.

« J’ai l’impression d’avoir une pratique assez monomaniaque… Je pense que le message que j’aimerais faire passer à ma communauté est aussi contenu dans cette idée-là ; creusez au maximum vos obsessions, même si c’est moche au début, avec le temps et la pratique, il en ressortira forcément quelque chose d’unique. » finit-il par dire. C’est réussi pour lui !