Dans le cadre de sa collaboration avec Adobe Stock, Fubiz associe deux nouveaux artistes, qui ont collaboré ensemble sur l’une des tendances créatives sélectionnées par Adobe : Brand Stand ou comment les marques et des acteurs influents peuvent agir sur la prise de conscience en matière d’écologie. Le photographe Patrick Masse, contributeur Adobe Stock et spécialiste de photographies sous-marines a offert à l’illustrateur Andrea Minini le support parfait pour imaginer des illustrations en moiré. Cette technique est caractérisée par l’entrelacement de lignes pour former des effets optiques très hypnotisants.

Au travers de ces créations en duo, les deux talents nous dévoilent l’urgence d’agir pour la protection de ces espèces en danger : les tortues, le lamantin et la baleine à bosses. Andrea Minini a ainsi imaginé représenter sous le prisme de son trait, les petits des animaux présents sur le cliché de Patrick Masse. Dans un rendu minimaliste, le résultat interpelle. 

Dans une interview croisée, ils nous dévoilent les coulisses de leurs créations et leur point de vue sur l’urgence écologique et sur l’implication des acteurs pour y remédier.

Fubiz : Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous en dire plus sur votre univers créatif ?

Patrick Masse : Je suis photographe et caméraman passionné par les grandes espèces sous-marines comme les requins et les mammifères marins. A mon sens, les deux techniques de prises de vue sont complémentaires. La vidéo apporte un témoignage précis sur le comportement des espèces alors que la photo apporte la précision et le détail. Les deux techniques permettent au photographe d’ajouter sa touche personnelle de créativité malgré les exigences inhérentes à chaque discipline.

Andrea Minini : Je suis illustrateur italien basé à Novara. Je crée des illustrations vectorielles en utilisant des lignes et des motifs de lignes et, de temps en temps, l’effet moiré.

Patrick, qu’est-ce qui vous conduit à vous intéresser à la photographie sous-marine?

Né au bord de la mer méditerranée, j’ai été initié très tôt à la chasse sous-marine, une activité que j’ai pratiqué jusqu’à ce que j’échange mon fusil harpon pour un appareil photo étanche. Dès lors, j’ai réalisé que le sport restait le même mais que l’impact sur la nature était bien moindre. Un beau spécimen peut être photographié plusieurs fois ! Cette nouvelle passion m’a amené à plonger dans les cinq océans même si je garde une prédilection marquée pour le pacifique et les caraïbes où j’ai effectué de très nombreux séjours à la rencontre des 5 grands requins prédateurs et plusieurs espèces de baleines.

Andrea, une grande partie de votre travail est consacrée à la mise en avant des espèces animales menacées. Comment avez-vous eu l’idée de ce sujet?

Mes illustrations, mélangées à une photo, semblent immatérielles et délicates. La photo, en revanche, représente la réalité telle qu’elle est. Cela crée un fort contraste plein de significations.
De plus, il s’agit d’un bon moyen de représenter un «risque», le risque réel auquel nous sommes tous confrontés à l’heure actuelle.
Puisque nous parlons des océans, je voulais choisir les victimes les plus vulnérables de la pollution et du changement climatique: les espèces en voie de disparition. J’ai choisi les baleines, le lamantin et les tortues, mais il y en a beaucoup d’autres. En bref, le message est le suivant: ne les laissez pas disparaître. Car ce que l’on peut voir maintenant (la photo), n’est pas garanti pour les générations futures (l’illustration).

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre processus de création?

P.M : L’image sous-marine est un sport très exigeant. Elle suppose, comme préalable indispensable de maîtriser parfaitement la plongée et les contraintes physiques nombreuses et la fatigue engendrée par les plongées répétitives. L’autre aspect de la photographie sous-marine, comme la photographie animalière terrestre d’ailleurs, est que l’espèce que vous recherchez n’est pas toujours au rendez-vous. Les océans n’ont pas de frontières, et les animaux sont libres de se déplacer où bon leur semble. Il m’est arrivé d’aller à l’autre bout du monde pour photographier une espèce et de revenir sans un seul cliché. Le photographe animalier doit savoir faire preuve de beaucoup d’humilité et de patience.
Côté technique, le photographe doit savoir composer avec une lumière faible, une absence quasi totale de couleurs naturelles et des visibilités réduites qui empêchent l’utilisation de téléobjectifs. Dès lors, il n’a d’autre choix que de s’approcher au plus près des espèces qu’il veut photographier. Une bonne photo de requin doit être prise à moins de trois ou quatre mètres de l’animal, quelquefois beaucoup plus près.

A.M : C’est juste une question de synthèse. Tout le monde connaît la devise de Mies Van Der Rohe, «less is more». Je fais de mon mieux pour suivre cette règle simple lors de la conception. Lorsqu’un détail, une courbe ou une ligne n’est pas nécessaire, supprimez-la. Mon objectif est d’obtenir l’essence d’un sujet, qu’il s’agisse d’un animal, d’une architecture ou de tout le reste.

Vos créations témoignent aujourd’hui de l’urgence de protéger cet écosystème. Pensez-vous que la prise de conscience est suffisamment importante et que les marques et entreprises ont saisi l’urgence de la situation?

P.M : Au cours de mes nombreux voyages à travers le monde, j’ai peu à peu pris conscience des merveilles que recèlent les océans, de leur fragilité et de la pression que les activités humaines font peser sur elles : surpêche, pollution chimique, macro déchets, plastiques… la liste est longue.
Je me suis dit que la photographie sous-marine ne pouvait pas rester uniquement une passion. Pour apporter ma pierre à l’édifice, je donne régulièrement des conférences sur le thème de la conservation.
Mes travaux m’aident à illustrer ces conférences, à les rendre plus ludiques, à vulgariser un monde que peu ont la chance d’entrevoir et à démystifier certaines croyances populaires bien ancrées dans l’imaginaire collectif.
L’un de mes grands combats est de militer contre le commerce des ailerons de requins dont l’essor, ces 40 dernières années, a entraîné une réduction de plus de 90 % de la population de certaines espèces.
J’ai également réalisé des reportages sur ce thème, primés dans de grands festivals internationaux : Requiem pour un géant et Le rocher de la convoitise
Les consciences s’éveillent peu à peu, surtout chez les jeunes générations qui réalisent que leur patrimoine est directement menacé.
Que ce soit sous la pression de l’opinion ou grâce à la prise de conscience de leur dirigeants, les d’entreprises prennent de plus en plus de mesures en faveur de la planète et c’est une très bonne chose.
Il faut pourtant rester lucide et savoir que dans ce domaine, tout ou presque reste à faire.
J’ai récemment fondé une start-up dans la publicité digitale, « One Planet Only » dans laquelle nous avons décidé collégialement de n’utiliser aucun papier ni aucun plastique.

A.M : Je ne suis pas sûr, mais je le pense vraiment. Je suis optimiste à ce sujet. J’ai deux enfants, je dois être optimiste. Mais, puisque les marques et les entreprises jouent un rôle très important dans la prise de décision, les gouvernements sont essentiels. Les dirigeants du monde doivent montrer le chemin.

Adobe a sélectionné cette thématique parmi les tendances créatives de l’année 2019. Dans quelles mesures pensez-vous que l’art et les créatifs puissent éveiller davantage les consciences et participer au partage de cette problématique?

P.M : La photographie touche le grand public. Elle apporte un témoignage essentiel à la prise de conscience du plus grand nombre. Le photographe naturaliste ne peut plus être un simple spectateur. Il doit mettre à profit son art et ses talents pour témoigner de la beauté, de la fragilité et des menaces qui pèsent sur nos écosystèmes, qu’ils soient marins ou terrestres.

A.M : L’art a toujours été utilisé pour transmettre des messages et créer une prise de conscience. Donc, oui, c’est crucial. Et je suis heureux que ce thème soit une tendance créative pour 2019.

Si vous deviez résumer votre travail en une phrase, quelle serait-elle?

P.M : Je suis un photographe naturaliste engagé pour la planète !
A.M : Plus c’est simple, mieux c’est.

Dans les prochains jours, nous vous proposerons sur Facebook de sélectionner vos cinq images favorites de la collection Adobe Stock, sur le thème de l’écologie et de la protection de la faune et de la flore.