Grandiose, alarmant, bigarré, surréel ou encore épatant, l’univers graphique de l’artiste espagnol Al Mefer impressionne autant qu’il inquiète. C’est d’ailleurs l’effet escompté: l’artiste utilise sa caméra – et parfois son ordinateur – pour donner vie à des paysages naturels post-apocalyptiques où la beauté du monde semble en danger, avec une poésie vibrante digne de la science-fiction. Talent émergent prolifique dont les travaux ont été très partagés en 2018, nous lui avons posé quelques questions pour en savoir plus.

Bonjour ! Dis-nous en plus à propos de toi. Quel parcours t’a mené à devenir photographe?

Ma première expérience avec la pratique artistique a été le dessin. J’ai commencé à dessiner dès l’enfance, principalement des portraits, et je le fais toujours. J’ai toujours trouvé le dessin très méditatif et libérateur. Je peux passer des heures sur une œuvre sans remarquer le temps qui passe, la faim ou la soif ! Lorsque j’étais adolescent et que j’ai découvert Internet, j’ai passé beaucoup de temps à lire sur l’art et j’ai compris que la photographie était un outil précieux d’expression. J’ai particulièrement apprécié les différentes techniques numériques.

Quelques années plus tard, mon frère m’a offert un appareil photo compact et j’ai commencé à expérimenter le portrait. Cependant, quand je suis allé à l’université, j’ai arrêté de prendre des photos et je dessinais encore plus rarement. Avec le besoin croissant d’avoir à nouveau ce processus méditatif dans ma vie, je me suis acheté un nouvel appareil photo en juillet 2017 et j’ai commencé cette aventure. Je n’avais pas du tout prévu d’en faire quelque chose de particulier. Je ne pensais d’ailleurs pas faire de la photographie de paysages ni d’avoir autant de visibilité, je voulais juste profiter de la création à nouveau.

Comment décrirais-tu ton propre univers artistique?

Lorsque j’ai recommencé à prendre des photos, mon principal objectif était de réaliser mon expression esthétique sans prétention. Je ne savais pas dans quel style je voulais me plonger, mais je savais que je voulais façonner un univers authentique, avec une certaine linéarité dans sa valeur esthétique. Mes images se sont révélées solitaires et mystérieuses, avec des atmosphères empreintes d’étrangeté, teintées de couleurs saturées et peu naturelles. J’aime penser que ces environnements fictifs et calmes invitent le spectateur à rester conscient, en considérant que d’autres mondes sont possibles et où cette perception serait alors totalement différente.

En effet, ton travail est énigmatique et toujours un brin futuriste. Quels sont les thèmes que tu explores dans tes séries?

Comme je le disais, cet étrange sentiment qui ressort des photos est mon outil préféré pour interpeller le spectateur. Qu’il s’agisse d’une perception dépressive ou angoissée, de la déconnexion ressentie par les habitants des grandes villes, des possibilités futures, des marques du changement climatique sur la nature ou encore des bouleversements politiques à venir; je souhaite utiliser ces mondes surnaturels sous forme de séries afin de présenter des scénarios hypothétiques qui peuvent donner lieu à des discussions sur le futur et le dissemblable.

En tant qu’artiste visuel qui touche à tout, tu utilises principalement le médium photographique, mais tu crées aussi quelques séries en CGI (Computer-generated imagery/Imagerie assistée par ordinateur).

Le CGI m’a ouvert un monde de possibilités. Je m’intéresse à presque toutes les formes artistiques; je dessine et je peins depuis mon enfance, mais je m’intéresse également à la poésie ou encore aux installations artistiques. Mon objectif n’est pas tant la technique, c’est davantage de pouvoir livrer une vision. Grâce au CGI, on peut représenter presque n’importe quoi avec un logiciel performant. J’apprends actuellement à coder, et je le fais en partie pour faire fusionner ce domaine avec les arts et créer des travaux interdisciplinaires qui me permettront de donner vie à mes idées.

Quel serait le projet artistique que tu rêverais de faire?

Je travaille actuellement sur un court métrage, et je prévois également de faire quelques séries de portraits avec une thématique assez provocante. Je suis heureux de dire que pour l’instant, je réalise exactement ce que je rêve de faire!

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